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Interview du Webmestre sur France3
 Le même jour dans le même quotidien
Auteur: Webmestre 
Date:   2001-04-11 14:58:21

Le Père Borges au "Quotidien d'Oran"

"Saint Augustin était un homme de dialogue"

Le père Lucien Borges vit en Algérie depuis 30 ans. Il est le recteur de la basilique de Saint Augustin, à Annaba. Membre du comité de préparation du colloque international sur Saint Augustin, il revient ici sur les idées universelles de ce philosophe, et propose, du coup, la création d'un centre d'études augustiniennes à l'université d'Annaba, où la famille augustinienne compte déjà une bibliothèque.

Le Quotidien d'Oran: Père Borges, comment percevez-vous la notion d'universalité chez Augustin ?

Le Père Borges: C'est une question à laquelle le colloque consacre bien deux journées... Les conférenciers proposent une lecture littéraire des dialogues de Saint Augustin, qui sont, aussi, faut-il le dire, ses premières oeuvres. Saint Augustin fait preuve d'une authentique méthode ancienne (au sens de méthode des philosophes grecs), qu'on peut considérer, déjà, en soi comme une ouverture vers l'universalité. Il puise dans une tradition: le dialogue. C'est à ce niveau que se situe, pour lui, cette notion d'universalité: trouver, dans les valeurs, des traditions. Il entre dans les perspectives des autres et les fait siennes. C'est aussi un professeur qui a beaucoup de respect pour ses élèves. La question peut être traitée d'un point de vue mystique ou philosophique... "Qu'est-ce qu'on voit ?", s'interroge-t-il.

M. Grazia Mara, spécialiste italien des dialogues de Saint Augustin avec Dieu, s'est aussi penché sur cette question en essayant de mettre en valeur la relation de dépendance qui lie l'homme à Dieu, selon Saint Augustin, créature de Dieu, mais libre et responsable. Des valeurs universelles comme la grâce, la providence mettent en perspective la question de l'humanité d'un point de vue anthropologique. L'homme n'est pas une bête parmi les autres. Saint Augustin partage ces valeurs avec toute autre tradition, et en particulier avec l'islam. C'est pourquoi, M. Bouamrane a fait référence à cette problématique chez Ibn Rushd, et les Mou'taziline, cette école des premiers philosophes musulmans au VIIIe (avant la fermeture de la porte d'El Idjtihad).



Q.O.: A un moment de sa vie, Saint Augustin, alors évêque de l'Eglise d'Afrique, s'est opposé à Rome. De quelle nature était ce différend ?

Le P.B.: Le problème s'est toujours posé avec le centralisme de Rome. Originellement, toutes les églises sont indépendantes, et les catholiques, mais le centralisme de Rome... Le problème était: comment respecter les différences dans l'unité et la communion ?

C'est là que Saint Augustin a pris la défense de l'Eglise d'Afrique, à travers la question du pelage: "Est-ce que l'homme est capable avec ses propres moyens de faire le bien ?". Rome disait que oui, quand l'Afrique du Nord disait non, en ce sens elle a toujours lutté pour son indépendance. Son point de vue sera d'autant plus vrai que le pape lui donnera raison plus tard.



Q.O.: Quels étaient les arguments de Saint Augustin ?

Le P.B.: Saint Augustin puise son argument fondamental dans la volonté humaine, affaiblie après le péché d'Adam, mais pas totalement détruite. La grâce ouvre le chemin vers le bonheur...



Q.O.: C'était la "Cité de Dieu" ?...

Le P.B.: Bien sûr ! La Cité de Dieu, c'est cette émergence dans les conditions humaines de cette possibilité de pouvoir être épargné en faisant le bien aidé par la grâce de Dieu. Si on s'en tient à cela, le combat est en nous, le mal et le bien sont en nous, dit S.A. Nous sommes en lutte. A ce moment-là, qui va gagner en moi ? Comment le bien peut-il gagner en moi ? Là, l'acte de volonté est déterminant. Saint Augustin disait dans la "Rémission des péchés: "La grâce est donnée non pas pour détruire la volonté, mais pour qu'elle la soutienne dans son effort afin d'éviter le mal et le bien". C'est là qu'on rejoint les Mou'taziline.



Q.O.: Lors de cette seconde journée, il a beaucoup été question de Saint Augustin dans ses rapports au pélagianisme, le donatisme et le manichéisme. Pouvez-vous revenir là-dessus ?

Le P.B.: Dans l'intervention du professeur Wermlinguer, j'ai remarqué deux choses: la communication, les lettres de Saint Augustin. Cela prouve quoi ? Qu'il y a un réseau de correspondances. Augustin est connu pour ça, l'homme qui fait savoir exactement comment sont les choses, qui étudie, qui s'informe. Il n'est pas l'homme des préjugés. Il sait reconnaître ses erreurs. La polémique qu'il a eue avec les pélagiens lui a permis d'affirmer et ses conceptions philosophiques et ses conceptions théologiques sur le vouloir humain. Contre les Manichéens, il admet que la nature est bonne, mais il faut déterminer les conditions de la pratique de cette bonté à l'intérieur des gens. Consciemment, notre nature est bonne, mais après le péché originel, elle n'a plus la possibilité de mettre cette bonté en pratique. Concernant les Manichéens, le professeur Johannes Van Ort a souligné l'idée de la Lumière qui est très importante. Le Manichéisme était un syncrétisme entre la religion chrétienne et la sagesse orientale, ce que nous appelons techniquement une "gnose", un savoir ésotérique. Ce qui intéressait, cependant, Augustin, c'était le problème du mal. D'ailleurs après 30 ans de bataille, il arrive dans la Cité des Dieux, et déclare que le mal c'est les mauvaises volontés, quand les Manichéens soutiennent l'idée selon laquelle le mal est un principe des ténèbres. La volonté est malade, dira alors Augustin, mais elle n'est pas morte. La vraie Lumière, pour lui, devient alors lectrice...



Q.O.: Ne trouvez-vous pas paradoxal, Père Borges, que le colloque soit initié par des Algériens, et qu'il soit animé par des Occidentaux ?

Le P.B.: L'idée fondamentale, au départ, quand le président de la République nous a proposé d'organiser ce colloque, était de parler de Saint Augustin. Et ce n'est pas un colloque islamo-chrétien, loin de là. N'oublions pas, non plus, que Saint Augustin a été caché, des années durant, des gens l'ont bien dit dans la salle, et beaucoup d'universitaires algériens ne le connaissent pas. Je pense qu'il faut partir de là pour que tout le monde puisse comprendre: parler de Saint Augustin, pour Bouteflika, revient à réhabiliter ce dernier avec un courage extraordinaire. La charte nationale algérienne résume la période qui précède l'islam en 10 lignes où le christianisme n'apparaît même pas. Moi-même, j'ai déjà écrit dans la presse algérienne que l'intelligentsia algérienne considérait Saint Augustin comme un défenseur de l'impérialisme romain et comme la force conservatrice qu'était l'Eglise catholique.

En Algérie, on ne le connaît pas, quand nous, en Europe, nous avons du mal - non pas à trouver des spécialistes de Saint Augustin - mais à limiter la liste des participants. Dites-vous bien qu'il nous a fallu 4 mois pour trouver un spécialiste algérien qui accepte d'intervenir dans ce cadre, le Pr Malti, en l'occurrence. J'ai proposé, pour ma part, la création d'un centre d 'études augustiniennes à l'université de Annaba. J'espère que mon idée sera retenue...

Djamel Amrouche

 Sujet Auteur  Date
 Paru dans le Quotidien d'Oran du 04/04/2001  nouveau
Webmestre 2001-04-11 14:56:31 
 Le même jour dans le même quotidien  nouveau
Webmestre 2001-04-11 14:58:21 
 Re: Paru dans le Quotidien d'Oran du 04/04/2001  nouveau
Mohamed 2001-07-14 17:31:54 
 Re: Paru dans le Quotidien d'Oran du 04/04/2001  nouveau
totocapt 2003-07-19 17:49:05 
 Re: Paru dans le Quotidien d'Oran du 04/04/2001  nouveau
djalil 2005-11-27 19:05:26 
 Re: Paru dans le Quotidien d'Oran du 04/04/2001  nouveau
keazy 2006-12-19 09:15:46 
 Re: Paru dans le Quotidien d'Oran du 04/04/2001  nouveau
thirga 2008-09-29 10:56:38 

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