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Interview du Webmestre sur France3
 KABYLITE, BERBERITE, TEMOIGNAGE ET REFLEXION
Auteur: amirouche 
Date:   2001-03-09 11:10:25

Azul fellawen marra,

La suite

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Cette transmission, à la fois, une histoire mythique, verticale et une histoire horizontale, temporelle.

A ce titre, si les Kabyles portent un intérêt particulier à l’histoire écrite, ils ont perdu, en revanche, l’histoire sacrée constituée par les mythes et les récits de fondation (cosmogonie, création du monde et de l’homme …). Si les associations kabyles se sont emparées de la culture savante concernant les Berbères, elles ont cependant laisser en friche toutes ces sources de la connaissance initiatique constitutive du noyau.

Les cultures n'ont pas les mêmes capacités d'adaptation et les mêmes lignes de fracture quand elles sont transplantées à l'étranger.

En tant que nord-africain, kabyle, je constate que nous représentons
en France un système endogame - idéal faisant partie de notre ethos, qui ne se réalise pas obligatoirement dans la pratique - face à un système français fortement exogame (depuis quelques siècles), fondé sur la notion de couple. Cette différence de système de filiation se révèle corrosive pour les Nord-africains, exposés sans défense, à des groupes professionnels (enseignants, psychiatres, assistantes sociales, éducateurs, juges ... ) prêts à démonter cette structure avec des théories fondées sur l'universalité de l'individu, en divergence avec les notions de personne et de famille, telles qu'elles sont conçues et vécues dans notre monde. Un système patrilinéaire strict s'oppose ici à celui du citoyen où les enfants deviennent majeurs et égaux à leurs parents dès qu'ils atteignent l'âge de dix-huit. ans.

Dans la conception d'un père kabyle, sa descendance ne peut se subsumer à lui qu'après sa disparition ou de son plein gré avec sa bénédiction. D'ailleurs, la relation père-enfant ne peut se comprendre qu'en référence à l'ancêtre. Néanmoins, un enfant peut dépasser son père à condition qu'il se rattache à un ancêtre, un être ou un maître invisible (inspiration, possession, vision).

Par la modernité, la valeur accordée à la jeunesse comme groupe autonome a éclipsé notre valeur fondamentale qui est la vieillesse, auréolée de notions de sagesse et de respect.

La dévalorisation des vieux (“ vieux vous’’) a commencé à se propager avec la colonisation. Le concept de jeunesse emprunté à l'Occident, a servi à la création de mouvements de jeunes, à l'origine des nationalismes modernes (jeunes turcs, jeunes tunisiens, jeunes algériens…),

Depuis l'émergence et le développement du nationalisme algérien, on observe une rupture continuelle entre les générations. L'absence de transmission débouche sur une violence récurrente entre les vieux et les jeunes, due au "sacrifice" de l’ancêtre. En effet, un enfant n'est pas immédiatement relié à son père: il n'est que le dernier maillon de la chaîne ancestrale. Un ancêtre se trouve à l'origine de chaque cercle, système d'emboîtement dynamique, comprenant des groupes allant de la famille à la confédération, mobilisés par une conception duelle du monde - ceux du haut, ceux du bas - traversés par des ligues (sof) en rivalité. C'est de l'ancêtre que vient la fertilité, la prospérité, la fécondité, la richesse, la protection, la chance. Il est souvent représenté par un mausolée on une zaouia.

La plupart des familles se référent à un ancêtre dont le nom diffère de celui donné par l'administration. L'état civil français, instauré en Kabylie vers la fin du 19ème siècle, a évincé les noms de tribus. Les enfants de seconde génération n’ont pas toujours accès à des noms ancestraux. Quant aux Kabyles, en. général, ils se sont adaptés à une double appellation ethnique et administrative. Ils ne semblent pas revendiquer leurs noms d'origine.

L'ancêtre est remis en cause à plusieurs niveaux, tout d’abord par l’Etat qui continue, apparemment, l’œuvre de désagrégation et d’homogénéisation des groupes (ethnies, castes et confréries…) entamée par la colonisation. Nous savons néanmoins que la notion de région et d'ethnie, tout en étant constamment occultée, reste d'une brûlante actualité. D’ailleurs elle est utilisée dans toutes les stratégies du pouvoir, en Algérie, dont le centre est constitué par des groupes issus d'une ou deux régions du pays.

Quant au système culturel imposé par la scolarisation moderne, il dévalorise la culture orale, inverse les hiérarchies traditionnelles (les jeunes sachant plus que les vieux) et disloque le système initiatique basé sur un savoir dont la source est toujours en amont, venant du monde invisible. Dans ce sens, l’école est génératrice de confusion entre la culture en tant qu’initiation et le savoir en tant que science.

Ainsi, un enfant apprenant à l'école que son ancêtre est un singe, sera troublé par cette inversion du monde, rabaissant son ancêtre vénéré, sanctifié à un animal. Son savoir initiatique sera totalement dévalué, En Kabylie, les singes proviennent de la métamorphose d'un groupe d'hommes qui se sont livrés à des actes anti-culture : c'est le résultat d'une malédiction divine.

La logique scientifique vulgarisée est apparemment reprise comme un énoncé mythique à partir duquel l'enfant s'est construit. Il semble moins catastrophique pour un citoyen de l'Etat (en Occident) d'apprendre qu’il est un descendant lointain du singe que pour un enfant de migrants kabyles, dont l'être dépend d'un ancêtre mythique mais proche (il peut apparaître dans les rêves, les visions ..). Les processus d'affiliation sont détruits : comment pourrait-il respecter son père et son patrilignage s'il pense qu'il descend réellement du singe ? Dans notre culture le mythe est toujours vivant : il est incarné et vécu grâce aux pratiques initiatiques, D'ailleurs dans la langue, la notion "El Haqq" (mot d'origine sémitique) signifie à la fois, vrai, réel et juste.

A suivre .....

Qimet di lahna

 Sujet Auteur  Date
 KABYLITE, BERBERITE, TEMOIGNAGE ET REFLEXION  nouveau
amirouche 2001-03-09 11:10:25 
 Re: KABYLITE, BERBERITE, TEMOIGNAGE ET REFLEXION  nouveau
Si Samir 2001-03-09 13:02:19 
 Frobenius et contes Kabyles  nouveau
L.M. 2001-03-09 15:32:55 
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amirouche 2001-03-09 15:39:07 
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amirouche 2001-03-09 15:33:14 
 Re: KABYLITE, BERBERITE, TEMOIGNAGE ET REFLEXION  nouveau
Ghania 2001-03-16 23:26:10 

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