Auteur: Hacéne
Date: 2001-07-24 15:57:26
Mais de quelles constantes nationales vous prévalez-vous messieurs ?
Nous assistons, depuis plus d'une décennie à une sorte de chantage dont use le camp Islam- conservateur à chaque fois que le pays tente "timidement" de prendre l'envol sur la trajectoire du progrès, le spectacle à quoi nous convient régulièrement ces baâthistes est une levée soudaine de boucliers à travers laquelle ils crient à trahison et brandissent aussitôt l'étendard des "constantes nationales" pour faire échec au projet.
Mais nom de Dieu! de quelles constantes nationales vous prévalez-vous ? De celles concoctées par le parti unique?
Amnésiques que vous êtes! Le parti unique est mort en octobre 1988 et, de là, il y a eu avènement du multipartisme et de la démocratie. Les "constantes" aux-quelles vous faites allusion, à chaque fois, sont elles aussi mortes en même temps que leur géniteur; ils ont été enterrés tous les deux le même jour et dans une tombe commune. Laissez-les donc reposer en paix !
Au lendemain d'octobre 1988, la page du parti unique et de ses pseudo- constantes a été définitivement tournée et c'est une autre, une vierge, qui s'est ouverte pour le peuple algérien.
Pourquoi vous acharnez-vous, Messieurs, sur les langues étrangères dont celle de Molière et de Rousseau ? Pourquoi vous opposez-vous "par tous les moyens" à la réforme de l'école, cette institution éducative devenue, grâce à vous, une véritable secte ? Pourquoi accaparez-vous les moyens de communication dont la télévision en particulier ? Pourquoi faites-vous fuir les cerveaux pour que vous occupiez leur place dans les rouages de l'État ?…
C'est tout cela les "constantes nationales" pour vous, Messieurs! C'est tous ces territoires accaparés… Ces territoires "mal acquis", et ce grâce à la politique menée plusieurs décennies durant par le parti-Etat. Et c'est d'ailleurs pour toutes ces raisons que vous êtes constamment nostalgiques au parti unique!
Tout le reste, Messieurs, c'est-à- dire tout ce qui ne vous convient pas est mis "hors" constantes nationales et jeté aux oubliettes à l'exemple des langue et culture amazighs. Sur ce point précis, justement, vous étaler un peu pour mettre à "nu" votre politique du "deux poids, deux mesures". C'est à votre adresse Messieurs: au lendemain de l'indépendance du pays, vous n'avez pas hésité un seul instant à décréter l'"arabe" langue nationale et officielle, et ce ,sans y être passé par un quelconque avis du peuple (comme vous exigez aujourd'hui un référendum pour la langue amazighe). Vous avez immédiatement après mis tous les moyens de l'État "et des faramineux" à la disposition (dont, entre autres, l'armada d'égyptiens, de palestiniens, de syriens… auxquels vous avez fait appel pour qu'ils viennent dispenser l'enseignement de cette langue) afin de lui assurer la vulgarisation et le développement. Pour être bref, après tous les avantages que vous avez accordé à la langue arabe dont sa constitutionnalisation (et ce, bien entendu, après qu'elle ait bénéficié d'un statut par décret), l'APN-FLN- présidée par Abdelaziz Belkhadem- a, à la veille de sa dissolution par le président Chadli en 1991, voté "à la sauvette" la loi sur la généralisation de son utilisation; quelques années plus tard, ce sera au tour d'Ahmed Ouyahia , alors chef du gouvernement, de sortir cette loi des fins fonds des tiroirs du premier Ministère pour la mettre "sans hésitation aucune" en application.
Quant à la langue amazighe, Messieurs, et vous ne pouvez aujourd'hui cacher le soleil avec un tamis, vous avez fait en sorte qu'elle demeure constamment au stade de dialectes (c'est-à- dire que rien n'a été fait depuis l'indépendance pour son développement si ce n'est le rejet pur et simple) afin de la minorer à tout moment. Tous les pouvoirs qui se sont succédés en l'espace de 39 ans (à la date du 5 juillet 2001) l'ont ignorée, voire honnie. Pour preuves , parmi tant d'autres, citons juste le premier mandat du haut commissariat à l'amazighité, lequel est arrivé à terme le 6 juin 1998 à minuit sans qu'aucun officiel ne s'en soit soucié. Après avoir attendu vainement un geste de la part de qui de droit, l'instance dirigeante du HCA a décidé de se maintenir en place pour un deuxième mandat et de poursuivre, par là, sa mission pendant trois autres années consécutives puisque la loi y afférente ouvre cette brèche, et ce, dans le seul cas de force majeure. Mais la fait le plus grave, hélas! Est que cette prolongation de trois autres années consécutives (décidée par le HCA, de son propre chef) soit elle aussi arrivée à terme le 6 juin 2001 à minuit sans que le premier magistrat du pays ait osé bouger le petit doigt (et ce malgré la sonnette d'alarme actionnée moult fois par le HCA, bien avant cette date butoir) pour assurer la survie de cette institution pendant qu'il n'oublie "jamais" de faire pour le "haut conseil Islamique" et le "haut conseil à la langue arabe". En conséquence, et depuis le 7 juin 2001, il n'y a officiellement plus d'instance dirigeante du HCA; seul les services administratifs assurent la permanence en attendant sans doute, d'être remerciés eux aussi et d'être mis dehors avec leurs archives. Nous arrivons donc à la conclusion que l'"Amazighité" est considérée "hors constantes nationales", et ce, contrairement à l'"Islamité" et à l'"Arabité" qui, en plus de cela, ne cessent de bénéficier de mille et un privilèges.
Assez de tout cela, Messieurs! Regardez en face de vous! Nous sommes au XXI siècle et les autres nations sont rentrées de "plein-pied" dans le troisième millénaire. Elles projettent, avec des moyens sophistiqués (des technologies de pointe pour être plus clair), comment conquérir d'autres planètes, pendant ce temps, vous, vous êtes encore là sur terre, occupés à poursuivre sans répit vos combines sur un damier en carton. Abandonnez vos pratiques obsolètes, Messieurs, et essayez plutôt de rattraper- si cela est encore possibles avec l'immense retard déjà accumulé- ceux qui vous laissent extrêmement loin derrière eux! A tout le moins, ne retenez pas le peuple; laissez-le libre de ses actes! Il n'a nullement besoin de conseilleurs et encore moins de tuteurs; il est assez mûr pour voler de ses propres ailes et il l'a démontré à plusieurs reprises!
Mouloud Haouche
(Djemaa N Saharidj
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