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Le Blog
Interview du Webmestre sur France3
 Le Maroc et la berbérité
Auteur: Amirouche 
Date:   2001-07-15 16:51:52

Y a-t-il un problème amazigh, au Maroc ?
La menace berbériste
Sérieusement, qui peut dire aujourd'hui, après des siècles de brassages, qu'il est
totalement berbère, totalement arabe, ou totalement arabo-andaou, ou bérbéro-andalou ou andalou-je ne sais quoi? À moins que l’on fasse des analyses d'ADN pour remonter le temps et la filiation génétique.

Par Abdellatif Mansour


Ce n'est pas faute d'avoir essayé, mais la violence intégriste qui sévit en Algérie depuis près de dix ans n'a pas pu être introduite au Maroc. Les chantres infatigables de l'extension du brasier algérien, ont décidé de changer leur fusil d'épaule. Place à la contestation kabyle. Pourquoi ne pas exporter un mouvement puissant qui a débordé de son foyer originel pour ébranler les fondations vacillantes du régime militaire d'Alger! La connexion est toute trouvée: Les Kabyles sont les cousins historiques des berbères marocains, or, au Maroc, il existe une militance berbériste qui ne demande qu'à être kabylisée.
Les relais médiatiques parisiens se chargent, comme d'habitude, de donner à ce rapprochement, de la texture, de la profondeur, de l'envergure et de l'imminence forcément explosive. Après un épais dossier livré par Jeune Afrique L'Intelligent, début mai, où l'histoire et la sociologie ethno-culturelles du Maghreb sont visitées à travers la lorgnette berbère, avec un arrêt bien senti sur le cas du Maroc, Le Figaro du 6 juillet 2001, a pris la relève.

Contagion


L'attaque de l'article fait évidemment référence à la révolte kabyle, pour enchaîner sur la mouvance berbériste marocaine. “Soucieuses d'éviter une contagion (kabyle), les autorités (marocaines) surveillent comme le lait sur le feu les initiatives des militants de la cause amazigh. Les manifestations de rue sont systématiquement interdites". On n'avait que “la question du Sahara" qui est en passe d'être réglée, on a maintenant “la question berbère", sans oublier la question de la vérité sur l'assassinat de Ben Barka.




Apparemment Le Figaro tout comme Jeune Afrique L'Intelligent s'inquiète sur le sort de la “cause amazigh" au Maroc. Encore faut-il que le rapprochement entre la lutte des Kabyles d'Algérie et les thèses des berbéristes marocains tienne la route. Ce qui n'est pas évident. En sortant des ghettos de Tizi Ouzou et de Bejaia, pour des démonstrations populaires à Alger et à Oran, les Kabyles ont clairement fait savoir que leurs revendications étaient nationales. Des revendications culturelles et sociales qui passent par une démocratisation de la société qui elle-même est conditionnée par la démilitarisation de l'appareil de l'État. Il n'est pas nécessaire d'être berbère pour être solidaire de ce genre de revendications universellement reconnues. En fait, depuis une décennie, il y avait de quoi être solidaire tous les jours avec le peuple algérien pris en tenaille entre les généraux et les intégristes.
Au Maroc, il y a eu effectivement interdiction d'une manifestation de solidarité avec les Kabyles où ne devaient pas, obligatoirement, y prendre part que des Amazigh pures souches, dûment authentifiés par le “comité du Manifeste berbère". Au-delà du droit citoyen de manifester, nous avons effectivement appris à descendre dans la rue sans casse ni débordements excessifs. C'est l'un des aspects positifs et normatifs de la transition démocratique. Ce qui précisément fait basculer dans des réactions et des situations régressives, en termes de libertés publiques, c'est ce genre d'instrumentalisation politique telle que le rapatriement laborieux du soulèvement kabyle par certains promoteurs du berbérisme marocain.


Rebérbériser


“Le timide réveil des Berbères marocains", titrait Le Figaro. Pas si timide que cela, en vérité. Les récentes sorties berberisantes se sont distinguées par des attitudes et des déclarations fracassantes, inquiétantes et infantiles. Lors d'une conférence de presse, le 11 juin 2001, pour annoncer l'accord de publication en arabe du Monde diplomatique par médiat-trust, la société éditrice de l’hebdomadaire Le Journal, Ignacio Ramonet s'est vu violemment reprocher d'avoir parlé du Maroc comme un pays arabe. “C'est une insulte, lui a dit un certain Lahcen Oulhaj, le Maroc n'est pas arabe, il est berbère". Silence dans la salle, rompu par le directeur du mensuel français qui rappelle ses origines italiennes et sa naissance casablancaise.




Le même Lahcen Oulhaj précise sa pensée dans le premier numéro de l'Essentiel: “Le Maroc redeviendra berbère, ce qu'il a toujours été. Tout dépendra de l'évolution du rapport entre les forces arabo-islamistes et le mouvement amazigh… Il ne faut pas exclure des accidents de parcours". Difficile d'être plus explicite. Il y a à la fois l'annonce péremptoire et la menace. L'auteur ne dit pas, cependant, par quelle stratégie il compte reberbersier un Maroc qui est, depuis quatorze siècles, arabo-berbère.
Provocation
Lahcen Oulhaj, ancien détenu politique, est passé du baâthisme au marxisme-léninisme, puis au blanquisme-berberisme. Avec ses pérégrinations idéologiques et ses déclarations outrancières, il est en fait l'illustration caricaturale mais réelle d'un mouvement fourre-tout qui part dans tous les sens, avant même de commencer à se chercher.
Un autre exemple de ce lâcher tous azimuts, lors du défilé du 1er mai 2001, à Rabat, un petit groupe de radicaux berbéristes brandissent une banderole où on lit, en arabe et en tifinagh: “Il faut corriger l'histoire, nous ne sommes pas arabes". Les photographes, les agences de presse, les ambassades, les journaux étrangers et quelques publications nationales n'avaient d'intérêt que pour cette banderole. Il n'y a pas de doute, le processus de kabylisation est en marche. Le mouvement amazigh a de beaux jours troubles devant lui. Il se radicalise dès le premier bonjour avec le public.
Dire “nous sommes berbères" est une affirmation où le néologisme le dispute à la tautologie. Une évidence tellement évidente qu'il n'y a pas lieu de la rappeler. N'empêche que ce rappel peut, à la limite, être considéré comme un droit. Un droit que monsieur de Lapalisse ne renierait pas. Dire, par contre, “nous ne sommes pas arabes", ce n'est plus un rappel mais un appel à la négation de “l'autre”. C'est tout simplement de la provocation. On se demande si les initiateurs de ce type de pamphlets provocateurs en ont calculé l'impact et les conséquences sur “les autres” justement.
Sur tous ceux, y compris des Berbères, qui se contentent d'être marocains dans une identité unique et suffisante. Et puis, franchement, dans l'ordre des priorités nationales actuelles, tels que l'affermissement de la démocratie, le décollage économique et l'atténuation des multiples fractures sociales, quelle urgence y a-t-il à mettre en avant ce genre de slogans déclaratoires? Pour quel but? Dans quelle perspective? Que gagnerait le Maroc à créer de toute pièce des démons éthno-régionalistes dont il est toujours parvenu à faire l'économie?
Urgence
Il faut croire que nous vivons une époque où il est de bon ton de lever des lièvres, pas seulement ceux qui font avancer la tambouille nationale, tous les lièvres possibles et imaginables.
Les lévriers sont évidemment à l'affût. Sur la question berbère, entre autres, ils s'essaient à un calcul mental hasardeux pour compter les Amazighs. Jeune Afrique L'Intelligent et Le Figaro s'accordent à chiffrer les berbères marocains dans l'ordre de 40% de la population, soit quelque douze millions. Ce n'est pas le chiffre qui importe, mais la méthode. Comment ont-ils procédé pour conclure à ce type de recensement ? Certainement pas par des analyses de l'ADN à grande échelle et de manière rétrospective sur des milliers de générations jusqu'aux souverains berbères de Maurétanie? Baga, Massinissa et autres Jugurtha ont certainement été mis à contribution pour livrer leurs codes génétiques.
Sérieusement, qui peut dire aujourd'hui, après des siècles de brassages, qu'il est totalement berbère, totalement arabe, ou totalement arabo-andalou, ou bérbéro-andalou (puisque c'est Tarik Ibn Ziad le Berbère qui a conquis l'Andalousie) ou andalou-je ne sais quoi? À moins que l'on adopte l'idée de la pureté ethnique et qu'on le dise. Un concept éminemment dangereux pour la raison suffisante qu'il porte les germes de l'exclusion et de la discorde. Ces idées-là sont antinomiques de l'histoire d'une communauté comme la nôtre, fondée, depuis la nuit des temps, sur la tolérance et l'enrichissement mutuel de tous ses constituants culturels.


Jugurtha


Du 22 au 24 juin 2001 devait se tenir, à Bouznika la deuxième rencontre du “comité du Manifeste berbère". Quelque cinq cents “représentants de régions" devaient y assister. Très tôt le matin du 22 juin, la paisible station balnéaire fut quadrillée par la gendarmerie. L'accès à la salle publique était impossible. La réunion fut interdite.
De quoi voulait-on débattre dans cette rencontre du troisième type? De la création d'un parti politique berbère. Rien que ça. On a déjà suffisamment de partis, si on laisse faire les berbérisants politiseurs, il y aura un parti pour chaque segment de fraction de tribu d'une confédération patriarcale. En somme, une belle unité nationale dans une merveilleuse démocratie tribale.
En fait l'idée n'est pas nouvelle. Elle a déjà été débattue lors du premier forum, à Bouznika même, le 14 mai 2000. Un rassemblement insolite, pas par parce qu'il a eu lieu, mais par son contenu et ses débats. Un rassemblement à deux étages. Il y a eu les revendications jugées modérées et recevables, donc retenues. Et celles à quoi nous avons échappé, mais néanmoins dites et ardemment défendues. Dans la première catégorie, on trouve essentiellement la demande de reconnaître, par un amendement constitutionnel, le parler amazigh comme langue nationale, et son inscription dans les programmes scolaires. Sur ces deux points, il n'y a plus de problèmes. Un consensus national est en train de prendre forme.
Le PPS, lors de son dernier congrès, du 6 au 9 juillet 2001, a intégré la revendication linguistique berbère dans ses résolutions. Même la positon traditionnelle représentée par le parti de l'Istiqlal a évolué sur cette question. Abdelkrim Ghalab, qui préfère s'exprimer sur les questions majeures par des livres, s'en est fait l'écho dans “De la langue à la pensée" (1993).
Il propose que le berbère soit considéré comme deuxième langue nationale après l'arabe, et enseigné à tous les Marocains, sans exception. La COSEF (Commission spéciale enseignement-formation) a institué, dans son projet de réforme, l'introduction de l'enseignement du berbère dans les régions où cela s'avère nécessaire. Les neuf revendications officiellement présentées “à qui de droit" sont d'ordre culturel et ne posent pas ou ne devraient poser aucun empêchement rédhibitoire, hormis les difficultés humaines et matérielles d'applicabilité.


Manifeste


Mais les séminaristes de Bouznika –et on en arrive à la deuxième catégorie des revendications non retenues- voulaient aller beaucoup plus loin. Deux référents fondateurs de l'identité nationale ont été remis en question sous couvert d'argumentaire historico-culturel.
Un. L'arabité du Maroc n'est plus qu'une usurpation inqualifiable qui devrait être déclassée, sinon carrément évacuée pour faire place à la berbéritude. Le panarabisme, avec ses courants de pensée et ses soubresauts politiques, auquel les Marocains se sont identifiés, est considéré comme un placage surimposé, une implantation artificielle que le substrat berbère devrait rejeter. Deux. Le nom même du pays, Al Maghrib, doit être remplacé par “Timouzgha", une appellation anté-islamique.
Malgré les précautions d'usage et les clauses de style, le Manifeste transpire un révisionnisme historique déclaré. Le point de mire, la redondance ressassée à grand renfort d'arguties historicistes et ethnicistes, c'est tout ce qui se réfère à l'arabité.
En clair, le Maroc est colonisé par les Arabes depuis l'islamisation conduite par Oqba Ibnou Nafii, il y a plus de mille quatre cents ans. Il est donc urgent -les temps actuels s'y prêtent, paraît-il- de décoloniser le Maroc, pour le restituer à ses premiers habitants berbères susceptibles d'être sélectionnés en remontant, de préférence au laboratoire, la filiation génétique à travers les siècles. Ceci pour Bouznika 1, fondatrice du Manifeste de référence.
Bouznika 2, qui n'a pas eu lieu, devait donner aux idées du Manifeste un canal politique conducteur et rassembleur. Un parti politique amazigh, à l'instar des modèles algériens, tels le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) ou le Front des forces socialistes (FFS), respectivement conduits par Saïd Saâdi et Houcine Aït Ahmed. Décidément, de l'Algérie ne nous arrivent que des courants qui nous veulent beaucoup de bien.


Tremplin


En définitive, le mouvement berbériste s'appuie sur une réalité sociologique tranquille, une composante fondamentale de l'identité nationale. Certains extrémistes de ce mouvement mettent en exergue des revendications culturelles légitimes, dont la satisfaction ne peut être qu'enrichissante dans un Maroc culturellement pluriel, pour en faire un cheval de Troie, un tremplin politique. Ce n'est pas un procès d'intention, c'est un non-dit tellement inavouable qu'il ne peut-être dit.
Le petit carré d'activistes extrémistes qui a pris en otage l'aspiration culturelle berbérophone, est composé d'individus en mal de causes, pour cause de crépuscule des idéologies universelles et de décrépitude des idéaux panarabes. Ils se sont repliés sur des bases vaguement ethno-tribales. Une pente dangereuse, particulièrement dans la phase multi-transitionnelle que traverse le pays actuellement.
Au moment où l'on aborde une solution politique intégrée de nos provinces du Sud, dans une dynamique d'autonomie fédérative, on nous oppose un projet de type africain, un éclatement du tissu national, avec une graduation de Hutus et de Tutsis.

EXTRAIT DU JOURNAL MAROC-HEBDO-INTERNATIONAL.

 Sujet Auteur  Date
 Le Figaro et les Berbères  nouveau
Amirouche 2001-07-15 16:47:31 
 Le Maroc et la berbérité  nouveau
Amirouche 2001-07-15 16:51:52 
 Re: Le Maroc et la berbérité  nouveau
Azrem 2001-07-15 17:38:42 

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