Auteur: si hadj mohand
Date: 2008-01-10 17:45:48
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Préface
Un chasseur alpin raconte sa vie. Un fils de « fellagha »
raconte la sienne. Ce qu’elles ont de communs, ces deux
existences : le lieu du déroulement du drame, Iferhounéne,
un village kabyle posté depuis l’ère des quinqué gentii1 sur
un mamelon qui fait face à l’imposante chaîne du djurdjura.
En y installant leur camp dés 1956, les forces
d’occupation avaient visé un objectif stratégique, inspiré
de la nature même du relief escarpé et de la position dominante
du chef lieu de cette portion du territoire
algérien : Observer les mouvements des villages environnants
: Tifilkout, Ait arbi, Ait @!#$, Ait Mansour,
Barber, Taourirt Ali Ouanacer, Tikilsa. Quant à Haadouche
et les autres, même cachés, ils ne seront qu’à quelques
minutes de marche de là, à portée de canon.
Jadis panorama touristique pittoresque, le Djurdjura allait,
des années durant, offrir une image apocalyptique ou
se mêlent tous les malheurs d’un peuple marqué par son
histoire déjà trop agitée : batailles sanglantes, embuscades,
ratissage …torture, viols, exécutions sommaires.
Le chasseur et le fils de fellagha, ont passé ensemble
une partie de leur vie, face à face, chacun de son coté de la
barrière… Du barbelé qui sépare le village du camp militaire.
Sans se connaître, ils ont vécu les mêmes
événements historiques qu’ils ont ressentis chacun à sa
1 quinqué gentii. Terme romain, utilisé pour designer les 5 premières
tribus berbères installées au flan DJURDJURA, appelé par les romains,
Mons Ferratus ou montagne de fer, en raison de la résistance
farouche opposée à l’occupant.
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manière, selon ses propres convictions. Différemment,
voire parfois même antagonistes, malgré le point commun
qui peut rapprocher les hommes dans certaines circonstances,
dans leur pensée, deux hommes épris de paix et de
justice.
Dans la première partie de cette oeuvre ; Le chasseur alpin,
nous livre les secrets de cette courte période de son
service militaire, passée à livrer bataille malgré lui, à un
ennemi invisible, au lieu disait-il, de séjourner en touriste
insouciant dans ce qu’en métropole, on appelait, fanfaronnerie
ironique « les vacances algériennes. »
Je ne dirai rien de sa vie privée, et ne porterai aucun
commentaire sur ses sentiments exprimés, dans ce livre
qui a le mérite de nous dire des choses authentiques, sans
détours, sur le drame vécu par le peuple algérien.
Si l’histoire est authentique, les noms des acteurs ont
été changés sciemment pour des raisons évidentes de respect
de la discrétion. Mais cela ne leur enlève en rien, la
reconnaissance du mérite ou la condamnation de l’opinion.
Nous laissons le soin sur cet angle, à l’Histoire pour en
juger.
A coté des faits véridiques endeuillants relatés par le
soldat, le narrateur a voulu mettre une place à l’amour, aux
sentiments positifs, à travers cette édile pour la Femme,
avec un grand F incarnée par YASMINA qui aurait pu
s’appeler Lila ou khelidja, ou encore Jacqueline, et résider
à Ait El Mansour, Taourirt ou encore Iferhounée, Tifilkout
ou Iril El Arbi ou tout simplement Lyon, Marseille, Nantes
dans un contexte de paix
Cette histoire est le fruit de la pure imagination délirante
du soldat français, pour rendre moins pénible, moins
cruelle, moins insupportable la vie, quand la mort est devenue
la rançon quotidienne pour tous, de quelque coté du
conflit où l’on peut se placer.
La deuxième partie de ce livre est consacrée aux récits
des faits de ces événements à la même période, vu d’un
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oeil d’enfant innocent, qui n’avait que 4 ans et grandi dans
le fracas des armes jusqu’à l’age de 12 ans, pour finir seul,
privé de tous ses parents happés par la machine de guerre
infernale d’une puissance militaire. Ils sont 8 hommes de
la même famille, tous dans la force de l’age, en bonne
santé, bien éduqués, lettrés, à être tués par l’armée française,
entre 1958 et 1960, tous les armes à la main. Ils
étaient, ce que la propagande coloniale appelait « les Fellaghas
», et, que l’enfant de la guerre, fils de « fellagha »,
lui, a toujours pleurés, en secret, dans ses moments de plus
grande solitude. Pour lui, il ne subsiste aucun doute : ils
sont morts pour leur patrie, en martyrs de la révolution.
Cette oeuvre se veut un témoignage fort sur le sacrifice
du peuple algérien, le drame des hommes, des femmes et
des enfants colonisés, dominés, maltraités, torturés, assassinés.
Il est aussi une lueur d’espoir pour les générations montantes
de pays développés pour refuser, rejeter le fait
colonial et condamner la guerre.
Livre 1
Un soldat français m’a raconté…
Un épisode de la guerre d’Algérie
qui s’est déroulé dans mon village :
Iferhounéne (Kabylie 1958-1960)
Première partie
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Insouciance
Août 1957, la date fatidique approchait, au mois de septembre
je serai convoqué pour effectuer mon service
militaire.
Ainsi une partie de ma vie s’achevait. Ma bicyclette
appuyée contre un arbre de la forêt de Senlis, j’étais allongé
sur un tapis de mousse et regardais le ciel bleu azur à
travers le feuillage d’un chêne centenaire. Mon enfance
me revenait en mémoire, toute ma tendre et heureuse jeunesse
passée dans ce quartier populaire de la Villette où se
côtoyaient Français, Italiens et Algériens sans grande harmonie
mais sans trop de problèmes. Les années de guerre
avaient eu raison des petites économies de mes parents,
consacrées en grande partie à l’achat de denrées payées au
prix fort, qui permirent à ma soeur et moi de nous alimenter
à peu près correctement.
Les instituteurs de l’école primaire de la rue de l’Ourcq
m’amenèrent jusqu’au certificat d’études que j’obtins facilement,
mais sans grand mérite, car j’apprenais facilement
et souvent mes leçons étaient retenues sur le chemin menant
à l’école.
J’avais passé avec succès l’examen d’entrée en sixième
du lycée Colbert, mais mon père, sachant qu’il ne pourrait
faire face à de longues et coûteuses études malgré les
bourses délivrées chichement, décida que j’apprendrais un
métier manuel. J’avais une préférence pour le métier
d’électricien, mais ma brave maman, gardienne d’immeu18
ble, (on disait concierge à l’époque, d’une façon moins
péjorative que maintenant) avait l’estime de "ses" locataires
et au cours d’une conversation avec une demoiselle de
l’immeuble, celle-ci lui fit part des avantages des métiers
des arts graphiques.
C’est ainsi qu’au mois de septembre 1951 la grande
famille des typographes comptait un apprenti de plus.
Merci chère maman de m’avoir fait épouser le plus beau
des métiers, hélas, obsolète aujourd’hui.
C’était le début de ma vie professionnelle, mais je ne
quittais pas pour autant l’enseignement général ; tous les
mercredis pendant quatre ans, je retrouvais les bancs et
ateliers de la prestigieuse École Estienne ; les professeurs
nous enseignaient avec autorité et compétence de solides
cours théoriques et pratiques sur les métiers de l’imprimerie.
Tous les soirs je rentrais chez moi vers 17h30 ; après
une rapide toilette, je rejoignais mes copains au café "La
Mandoline", c’était notre lieu de rencontre habituel ; le
petit groupe que nous formions était sans histoire ; tout le
monde nous connaissait, les quelques voyous du quartier
eux-mêmes nous saluaient, nous avions usé nos fonds de
culottes sur les mêmes bancs d’école ; pour eux, nous faisions
partie du paysage depuis toujours et ils nous
fichaient une paix royale. Nous avions de bons rapports
avec les Italiens et les Maghrébins qui malgré leur nombre
élevé se faisaient discrets.
Après avoir dégusté une ou deux boissons non alcoolisées
(le lait grenadine était très à la mode à cette époque),
nous "montions" nonchalamment jusqu’au métro "Crimée"
pour y retrouver d’autres copains et surtout nos
chères copines… J’étais très amoureux de Denise. Avec le
recul je pense qu’il s’agissait plutôt d’attirance physique ;
ce sentiment qu’inspire une jolie fille de dix-huit ans à un
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