Auteur: hacéne
Date: 2001-04-28 09:10:12
Les berbères, dont le bastion est la région de la
Kabylie en proie à des émeutes qui ont fait au moins vingt morts depuis le 18 avril, constituent une minorité linguistique et culturelle s'estimant brimée par la politique d'arabisation du pouvoir central d'Alger.
Cette minorité qui forme environ le tiers des 30 millions d'Algériens, s'est fixée dans les montagnes du nord du pays, en Kabylie et dans les Aurès, à l'est d'Alger, et au Chenoua près de Tipaza (70 km à l'ouest d'Alger).
Des berbères sont aussi installés au Sahara, dans la vallée du M'zab (Mozabites) et dans le Hoggar, où vivent les Touareg, les "hommes bleus" du désert. Les Imazighen, comme les berbères préfèrent être désignés, sont les autochtones du nord de l'Afrique. Leur territoire qui englobait l'archipel des Canaries, l'oasis égyptienne de Siwa, les côtes méditerranéennes et les confins de l'Afrique subsaharienne, s'est considérablement rétréci à partir du VIIème siècle de notre ère, après les conquêtes musulmanes et l'avancée de l'arabisation.
A l'indépendance des pays de l'Afrique du Nord à la fin des années 50 et au début des années 60, les populations berbérophones ont espéré une reconnaissance officielle de leur langue et culture, pour avoir été en première ligne dans la lutte contre le pouvoir colonial.
Mais les nouvelles autorités ont imposé l'arabe comme seule langue nationale et officielle, au détriment du berbère, exclu de l'école et des médias. Les partisans de cette cause ont même été accusés d'intentions sécessionistes et de francophilie, car réprimés dans leurs pays, ils ont transposé leur combat vers la France où se trouve une forte émigration berbérophone.
Menée dans la clandestinité pendant près de deux décennies en Algérie, la lutte en faveur de la reconnaissance de l'identité berbère a été portée dans la rue pour la première fois en 1980.
Après l'interdiction d'une conférence de l'écrivain Mouloud Mammeri à l'Université de Tizi Ouzou (110 km à l'est d'Alger), en Grande Kabylie, et d'un concert du groupe contestataire kabyle Imazighen Imula, des émeutes, violemment réprimées, ont éclaté en mars 1980 en Kabylie.
Début avril, la contestation gagne Alger qui connaît alors ses premières manifestations depuis l'indépendance en 1962. Les manifestants réclament la fin du régime du parti unique et l'instauration d'un système démocratique reconnaissant l'Algérie dans sa diversité linguistique et culturelle. Le 20 avril, les forces de sécurité prennent d'assaut l'Université de Tizi Ouzou pour en expulser les étudiants.
La répression a contribué à la création du Mouvement culturel berbère (MCB) qui commémore, chaque année, cette date pour maintenir la mobilisation. Le MCB réclame la reconnaissance du berbère comme langue nationale et officielle au même titre que l'arabe.
Avec l'instauration du multipartisme en 1989, cette langue commence à être tolérée dans les médias et sa reconnaissance est réclamée par certains nouveaux partis. Le MCB étend alors son influence au-delà de la Kabylie, notamment aux Aurès.
A partir de 1992, le pouvoir central qui a fort à faire avec la violence des islamistes, fait de nouvelles concessions aux berbères, soucieux de ne pas souffler sur le brasier kabyle toujours prêt à s'enflammer.
Dans la nouvelle constitution de 1996, l'amazighité (berbérité) est reconnue comme une composante de l'identité nationale algérienne, comme l'arabité et l'islamité.
Le berbère est admis dans les programmes scolaires à titre expérimental et un Haut commissariat à l'amzighité (HCA), rattaché à la présidence de la République, est créé pour prendre en charge cette revendication.
Ces acquis n'ont toujours pas satisfait les militants berbères qui continuent de réclamer pour leur langue un statut officiel, exigeant que l'Etat assume financièrement sa diffusion.
Aujourd'hui en Kabylie, ces revendications sont toujours présentes, mais l'aspect économique et social semble l'emporter.
Les manifestants, surtout des jeunes, réclament en priorité des logements et du travail pour les chômeurs fort nombreux dans cette région pauvre et surpeuplée.
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