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Le Blog
Interview du Webmestre sur France3
 Youcef Ben Khedda témoigne ....
Auteur: thamilla 
Date:   2001-08-24 21:58:06



'Les principaux chefs de maquis étaient acquis à la
«doctrine Abane»

le21 Juin 2000
s'ouvrait au tribunal de Bir Mourad Raïs le
procès en diffamation intenté à Ali Kafi pour les propos infamants qui,
dans ses récents Mémoires, ciblent l'un des héros les plus
valeureux de notre Guerre de libération : Abane Ramdane. Sa famille s'étant
portée partie civile afin de laver son honneur outragé, j'ai tenu à venir la
conforter autant par sympathie que par devoir de vérité envers
un homme qui a dominé par sa stature exceptionnelle la scène
révolutionnaire des années 1955-1957. Dans le quotidien la Tribune en date
du 18 août 1999, je m'étais déjà longuement exprimé sur le cas Abane.
Cette fois, je serai moins prolixe, m'efforçant
simplement de tirer les enseignements de la terrible tragédie à
laquelle son nom demeure associé.


Rassemblement des forces vives Fin 1955-début 1956, le
mouvement insurrectionnel du
1er Novembre 1954 avait pris une telle ampleur qu'il faisait
courir le risque à ses propres
promoteurs de les submerger par l'importance et l'urgence
desproblèmes qu'il charriait.
Dispersés entre l'intérieur et l'extérieur du pays,
ceux parmi les «vingt-deux» ou le «groupe des
neuf» qui avaient échappé à la mort ou à
l'arrestation voyaient la Direction qui, initialement
s'identifiait à eux, complètement éclatée, donc
inopérante. Ils étaient, par ailleurs, divisés quant
aux voies et moyens de conduire la Révolution. Les principaux
chefs de maquis comme Krim, Ben M'hidi,
Ouamrane et, plus tard, Zighoud, étaient acquis à la
«doctrine Abane» qui préconisait un vaste rassemblement
des forces vives du peuple algérien. Selon cette ligne, il
était admis que le FLN se devait de se
convertir très vite à une véritable stratégie d'union
nationale aussi large que possible, avec la participation des
éléments du PPA-MTLD encore à l'écart et, également
des nationalistes modérés
appartenant à l'UDMA de Ferhat Abbas ou à
l'Association des Oulama de Bachir Brahimi.

A l'opposé, certains membres de la Délégation
extérieure du FLN au Caire repoussaient toute
idée d'ouverture du commandement du FLN aux éléments
issus des anciennes formations politiques.
Ils considéraient cela comme la pire des déviations car,
prétendaient-ils, la pureté originelle de
la Révolution s'en trouverait gravement altérée. De leur
point de vue, seuls les hommes présents au rendez-vous
du 1er Novembre 1954 étaient dignes de diriger le mouvement.
Autrement dit, il reviendrait aux
«Historiques», et à eux uniquement, de jouir d'une
monopolisation sans partage
du pouvoir de décision. Est-il besoin de préciser que le
concept d'«Historiques» a d'abord été lancé par
la presse occidentale de l'époque pour désigner, par
commodité, la poignée d'hommes qui
avaient présidé au déclenchement insurrectionnel.

A la faveur d'un glissement sémantique tout à fait abusif,
ce mot s'était ensuite chargé d'une connotation
foncièrement
militariste, laquelle avait fini par prévaloir dans les esprits
peu politisés. La primauté du politique sur le militaire
L'assimilation sommaire des «Historiques» aux
«militaires» procédait d'un simplisme
réducteur. Elle impliquait l'inévitable dévalorisation
des «politiques»,
assimilés à leur tour aux «civils» et même,
péjorativement, aux «politiciens» et, de ce fait,
cantonnés dans un
statut subalterne. Une telle discrimination reflétait une tendance
sans cesse croissante à ne
compter que sur la force des armes. Privilégiant le militaire au
détriment du
politique, elle était en porte-à-faux avec les conceptions
d'un Ben Boulaïd ou d'un Ben M'hidi, qui se
considéraient
avant tout comme des militants politiques portant l'uniforme par
nécessité. Que leur
fût accolée l'étiquette d'«Historiques» qu'ils
n'avaient, au demeurant,
jamais sollicitée, ils n'en récusaient pas moins
l'idée qu'on pût les ériger en catégorie à
part,
ou en caste militaire en charge exclusive du destin
national.

C'est à Abane qu'échoit et le mérite et le courage
d'avoir réhabilité le rôle fondamental du
politique en renvoyant à une lecture plus serrée et plus
exigeante de la
Proclamation du 1er Novembre. Celle-ci, en effet, consacrait sans la
moindre
équivoque l'intangibilité de principe de la prééminence
du FLN sur l'ALN. Grâce au puissant soutien
de Ben M'hidi, Abane parviendra à transposer cette
prééminence dans la
plate-forme de la Soummam sous la formulation désormais
célèbre de
«la primauté du politique sur le militaire». Il va de soi
qu'Abane ne
niait en aucune manière l'action déterminante et
irremplaçable de l'ALN. Dans ses tracts et ses déclarations, il ne manquait
jamais de glorifier l'efficacité et l'héroïsme des djounoud,
d'exalter leurs sacrifices et leurs souffrances aux côtés du peuple. Il
redoutait cependant que ne se renforçât une certaine évolution amorcée dès 1956 qui,
petit à petit, semblait reléguer au second plan la nécessité
impérative du travail politique au sein des maquis. En donnant la
prépondérance aux impératifs de la confrontation sur le
terrain, en subissant la dictature du champ de bataille
consécutive à la radicalisation du conflit, les responsables s'investissaient dans
le militaire à corps perdu.
Cela se soldait progressivement par une espèce d'évacuation du
politique au profit d'une vision purement guerrière de la
lutte de libération. Ce faisant, ils entérinaient la dépolitisation de l'esprit
combattant, laquelle était déjà en gestation dans la
généralisation des pratiques volontaristes et spontanéistes.
Sévissant de la base au sommet, un tel phénomène de
dépolitisation ne sera pas sans s'accompagner de carences et de déficiences se conditionnant
les unes les autres, sur fond d'inculture politique et d'indigence idéologique. Il
en résulta, entre autres, le rétrécissement des
perspectives et le déficit notoire des capacités d'analyse
et de synthèse ; l'incohérence par inaptitude à maîtriser l'ordre des urgences, et à
différencier le substantiel de l'accessoire, le formel et le spectaculaire du
«consistant» ; l'improvisation et la précipitation par recours aux initiatives à courte vue ;
surtout, l'autoritarisme sourcilleux articulé sur la répugnance
à se remettre constamment en question grâce à une autocritique salutaire. C'est
pour parer à des dégénérescences et des déviations aussi lourdes de
périls qu'Abane osera affronter les grands responsables militaires du moment
désormais majoritaires dans le CCE élargi en 1957 avec l'entrée en
force des colonels dans les organismes dirigeants. Un tournant capital était
pris qui laissera des traces durables dans nos institutions
jusqu'à l'heure actuelle. Complètement démonétisé, le politique
s'effacera pour de bon devant la prépondérance du militaire.

L'assassinat d'Abane entérinera l'échec de sa conception élitiste de la Révolution ;
il scella le déclin irréversible du primat du politique comme fondement essentiel de
toute construction populaire et démocratique authentique. En
contrepartie, qu'avaient donc à proposer ses adversaires ? Beaucoup de grandiloquence
mais peu de substance.
L'esprit de novembre On continuera à vivre avec l'exaltation des faits d'armes
et des prouesses passés mis en scène par la «famille révolutionnaire», à coups de
célébrations et de commémorations sans fin pour servir une histoire encore atrocement sélective.
Et pendant ce temps, le peuple
marginalisé et maintenu dans un état de délabrement moral
sans issue tantôt gronde et tantôt se morfond dans sa désespérance. Bafoué dans ses
droits, privé du devoir légitime de contester et de s'opposer, il vit en
permanence sous les fourches caudines des dispensateurs de la pensée unique qui n'ont de
cesse d'entretenir la désunion, de propager le mépris de l'autre, et
de miner tout ce que nos populations renferment de sacré.

Partisan résolu de l'ouverture du FLN à tous les
Algériens quelles que fussent leurs opinions, il réussira, avec l'aide décisive
de Ben M'hidi, à le démocratiser en cassant le monopole que les «Historiques» exerçaient sur sa
Direction. Et c'est encore d'ouverture démocratique et de l'arrêt de cette
pensée hégémonique qui nous régit sous la contrainte que
nous avons aussi le plus soif à l'heure présente. L'esprit de
Novembre avait guidé les pas d'Abane. Ranimons-le donc, et retournons à ses valeurs
sacrées, car ce sont elles qui ont cimenté notre unité
nationale durant la guerre. Efforçons-nous les uns les autres de sauver
l'Algérie à nouveau. Réconcilions-nous avec nous-mêmes, et acceptons-nous
dans le respect de nos mutuelles différences en sorte que ces
différences ne soient plus sources de fitna mais matière à enrichissement par
tolérance interposée.
Si chacun se mettait à tuer quiconque n'est pas de son bord,
si nous persistions à nous entre-tuer, si nous ne faisions preuve de
tolérance les uns vis-à-vis des autres, alors, d'autres Abane tomberaient,
le pays poursuivrait sa chute libre,
s'enfonçant dans une régression sans rémission. Nous
aurons alors préparé de nos mains inconséquentes le terrain à
une autre forme de colonisation plus cruelle, plus pernicieuse, plus terrifiante que
celle dont nous avions triomphé. La tolérance, rien que la
tolérance, tel devrait être dorénavant notre mot d'ordre
pour que nos enfants et les enfants de nos enfants puissent vivre dans une
société de justice, de paix et de progrès, car en elle réside le
secret de notre renouveau et de notre réussite. Que la tragédie
d'Abane nous serve de leçon.

 Sujet Auteur  Date
 Youcef Ben Khedda témoigne ....  nouveau
thamilla 2001-08-24 21:58:06 
 Re: Youcef Ben Khedda témoigne ....  nouveau
yanis 2001-08-25 13:35:42 
 Re: Youcef Ben Khedda témoigne ....  nouveau
thamilla 2001-08-25 15:18:17 
 Re: Youcef Ben Khedda témoigne ....  nouveau
Amirouche 2001-08-25 23:00:08 
 Re: Youcef Ben Khedda témoigne ....  nouveau
thamilla 2001-08-26 14:30:55 

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