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Interview du Webmestre sur France3
 Le procès implicite engagé par les "arabo-islamistes" contre la Kabylie ...
Auteur: Amirouche 
Date:   2001-01-05 14:58:36

Lu pour vous, un article interessant et reste d'actualité. C'est dans le sillage de ce que j'ai posté déjà. Bonne lecture.


Le bloc-notes d'Alexandre Adler
Le procès implicite engagé par les "arabo-islamistes" contre la Kabylie ne tient pas un instant


Efforçons-nous d'être équitables un court instant envers la décision du gouvernement algérien de réintroduire à nouveau le problème de l'arabisation au coeur du débat politique. C'est vrai, le colonisateur français a eu, dans tout le Maghreb, une "politique berbère" explicite : du cardinal Lavigerie, archevêque d'Alger à la fin du XIXe siècle, au maréchal Juin, qui fit installer à Rabat le plus grand feudataire berbère de l'Atlas, le Glaoui, en lieu et place du sultan Mohammed V, la politique de la France a consisté bien souvent à diluer l'arabité du Maghreb, première phase d'une politique qui, dans l'esprit de ses instigateurs, devait à terme aboutir à faire reculer l'islam. La résistance linguistique berbère, de l'Atlas marocain au Sud tunisien, en passant par la Kabylie, les Aurès et le Sahara touareg, aurait représenté une esquisse de digue face au modèle arabo-islamique et préparé la réévangélisation de ces populations autrefois chrétiennes ou juives (la Kahina, la reine des Berbères opposée au djihad arabe du VIIe siècle, était de religion hébraïque, comme nombre de ses ancêtres depuis des siècles). De fait, de "dahir berbère" en implantation des Pères Blancs dans toutes ces montagnes pelées et délaissées par les anciens conquérants arabes comme par les nouveaux, européens, au profit des plaines fertiles, quelques conversions s'opérèrent. Et, partout, l'usage du français vint s'ajouter à celui du tamazight, souvent au détriment de l'arabe.

Tout cela est exact, mais les nationaux-islamistes maghrébins oublient opportunément la suite de l'Histoire, c'est-à-dire, pour l'Algérie - et même pour le Maroc -, la résistance acharnée des Berbères à la colonisation (la Kabylie ne sera "pacifiée" qu'en 1857, vingt-sept ans après la prise d'Alger), que l'on trouve aux racines de l'émancipation nationale, depuis la révolte dirigée par le bachagha Mokrani en Kabylie, en mars 1971, en pleine Commune de Paris, et l'insurrection d'Abd el-Krim dans le Rif, au début des années 20, jusqu'à l'insurrection de la Toussaint 1954, partie des Aurès chaouis et bientôt étendue à toute la Kabylie, des portes d'Alger à Fort-National (aujourd'hui El Arbaa Nath Irathen). C'est la résistance kabyle, la plus acharnée, la plus courageuse, c'est son relais prolétarien à travers la Fédération de France du FLN, largement kabyle, qui ont pesé de tout leur poids dans la lutte pour une Algérie "algérienne". Les bien-pensants de l'arabo-islamisme oublient également de nous dire que les quelques intellectuels catholiques kabyles comme Jean Amrouche, loin de défendre l'Algérie française qui les avait suscités, furent des partisans, certes modérés, mais fidèles, de l'indépendance - tout comme l'Eglise d'Afrique du cardinal Lavigerie devint, au grand dam des pieds-noirs, celle du cardinal Duval, qui opta pour la citoyenneté algérienne, et aujourd'hui de l'archevêque Claverie, assassiné par les intégristes.

Bref, le procès implicite contre la Kabylie ne tient pas un instant. La cause de la langue arabe non plus. Certes, les arabes dialectaux ne peuvent sans doute pas déboucher sur des langues modernes aussi facilement qu'on a pu le prétendre, et le maintien d'un idiome commun, du Maroc à l'Irak, présente d'évidents avantages culturels. Reste que le Maghreb n'est pas seulement arabe et que la grande majorité des Berbères arabisés, qui forment presque partout le fond de sa population, conservent leur manière de s'exprimer. Enfin, le français, que Kateb Yacine baptisait "prise de guerre", n'est pas seulement la langue du colonisateur, mais encore celle de l'émancipation. (Ben Bella fit scandale au sommet de la Ligue arabe, en 1955, en prononçant son discours en cette langue, la seule qu'il parlât parfaitement.) C'est aussi celle de l'abstraction, de la controverse et du débat démocratique. Faire reculer le français, c'est humilier les élites, peut-être demain réprimer la presse francophone impertinente, c'est enfin rompre les amarres avec l'émigration en France, porteuse de laïcité.
Les premières tentatives d'arabisation, dans les armées stalino-boumédiénistes, furent une tragédie qui entraîna l'effondrement de l'enseignement primaire et secondaire, ainsi que la mise à l'écart de grands intellectuels comme Moustapha Lacheraf, et qui, pour finir, donna au FIS sa première plate-forme et ses premiers sycophantes, comme Abbassi Madani, fonctionnaire du FLN introduit à l'université d'Alger dans le cadre de l'arabisation de l'enseignement supérieur.

Aujourd'hui, la manoeuvre se répète, mais elle a aussi des accents de comédie. Chaouis des Aurès, Zeroual et Betchine vantaient leur berbérité lors de l'élection présidentielle de 1995, quand on avait encore besoin des voix de la Kabylie (et des Algériens de France). Ce calcul est le fait de cyniques qui visent à donner un pourboire ridicule aux ralliés de l'AIS et à confondre leurs adversaires, les "éradicateurs". (Comme sont hypocrites les larmes de crocodile que versent les "dialoguistes saint-égidiens" sur Lounès Matoub, qu'ils avaient naguère catalogué comme tel !) Cette affaire fera monter des tensions artificielles. Puis tout rentrera peu à peu dans l'ordre, jusqu'à la prochaine alerte. L'armée, entre-temps, est totalement préservée de ces mesures kafkaïennes d'arabisation qui ne font progresser ni la pratique de l'arabe, ni celle du français, ni non plus la démocratie.
Comédie, donc, au coeur du drame sanglant du Maghreb. A moins qu'hélas cette dérisoire pantalonnade ne se termine au Maroc, où l'islamisme n'a pas encore sévi avec toute la virulence dont il peut être capable et où la population berbère, deux fois plus importante que celle vivant en Algérie, peut aussi connaître un terrible réveil.

ALEXANDRE ADLER
Courrier International
9/07/1998, Numero 401

 Sujet Auteur  Date
 Le procès implicite engagé par les "arabo-islamistes" contre la Kabylie ...  nouveau
Amirouche 2001-01-05 14:58:36 
 ce cher alexandre  nouveau
Ullial 2001-01-05 16:06:33 
 Re: ce cher alexandre a fait une analyse juste  nouveau
Si Samir 2001-01-05 17:37:22 
 Re: ce cher alexandre a fait une analyse juste  nouveau
Ullial 2001-01-08 10:36:36 

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