Auteur: A3essas
Date: 2001-06-07 17:18:20
Tamazight
De la Kabylie au Maroc: une contagion possible?
Une extension du mouvement de contestation en Kabylie à l’ensemble de l’Afrique du Nord ? Les militants de la cause amazighe au Maroc suivent avec attention
les événements en Algérie et en tirent des conséquences possibles pour leur propre action dans leur pays.
Sollicité par l’Agence France-Presse, Brahim Akhiat, président de l’association marocaine de recherche et d’échanges culturels, a déclaré que le «Côté identitaire du soulèvement de la Kabylie aura un grand effet notamment au Maroc, où il accélérera le rythme de la lutte des associations amazighe». L’homme que l’agence présente comme le président de la plus importante association amazighe au Maroc, estime que «la question identitaire se pose avec acuité dans toute l’Afrique du Nord et ne souffre plus aucun report».
Le parallèle avec l’Algérie est clair, puisque le mouvement amazighe au Maroc réclame lui-aussi «la reconnaissance de l’Amazighe comme langue nationale et officielle dans la Constitution du Royaume, à l’instar de la langue arabe». Le mouvement amazighe au Maroc paraît moins fort politiquement qu’en Algérie; il est par contre, en avance dans le domaine des travaux académiques sur la langue amazighe. Il reste qu’il entend être du plus en plus présent au plan politique. «Le mouvement a bien dépassé le cadre théorique et se trouve de plus en plus lié au mouvement de masse», a estimé Akhiat qui prend le soin d’insérer la revendication dans une dimension nationale, en rejetant toute approche ethnique ou régionale de la question amazighe au Maroc. Les associations amazighe du Maroc doivent organiser une marche au mois d’Octobre prochain pour défendre leurs revendications. Depuis l’ouverture qui a accompagné l’arrivée de Mohamed VI au trône, un grand débat agite les milieux militants amazighe: faut-il ou non créer un parti politique propre ? Question-polémique non seulement au sein de la mouvance amazighe mais également au sein de l’ensemble des partis politiques marocains. Dans une interview publiée il y a une année par le journal marocain Assahifa, le Président du congrès berbère mondial, Rachid Raha a défendu cette option par le fait qu’un «nombre considérable de la population amazighe ne se retrouve pas représenté par les partis politiques actuels.
De là, le besoin de constituer un parti pour les imazighen. Surtout que le mouvement culturel amazighe se distingue du fait qu’il a produit une élite assez large formée par des académiciens, des étudiants et des jeunes de professions libérales». C’est selon lui, un «processus historique» de voir le mouvement culturel se «transformer en politique (...) les imazighen sont marginalisés par des décisions politiques, et la réponse à ce fait ne devrait être que politique. Actuellement, le mouvement amazighe ne possède que des associations culturelles qui se limitent à publier des communiqués et à convoquer rarement des concentrations; c’est pour cela qu’il faut un cadre politique, pour répondre à ce qui marginalise politiquement la question amazighe».
Quelques 400 militants de la cause avaient signé une charte sur la question qui a été soumise au Roi Mohamed VI et d’aucuns y ont vu une démarche soutenue par le Palais, pour contrebalancer l’influence des islamistes. L’idée de la constitution d’un parti se heurte cependant à la lettre de la Constitution marocaine, qui interdit la constitution d’un parti sur une base ethnique ou religieuse.
De ce point de vue, islamistes et défenseurs de l’amazighité sont logés à la même enseigne. Deux petits partis existants, le Mouvement Populaire et le Mouvement National Populaire de Aherdane et Laansar, se font les défenseurs de l’amazighité, mais ils sont accusés de n’être que des émanations des services de sécurité marocains. Le mouvement culturel amazigh et même ses émanations politiques demeurent relativement dispersés pour que la «contagion» algérienne souhaitée par des dirigeants amazighe, ait vraiment lieu. Les avancées dans la revendication de Tamazight en Algérie donnent en tous cas des idées aux militants marocains.
K. S.
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