Auteur: Amirouche
Date: 2001-11-02 22:21:24
Azul marra fellawen,
L'article que je vous donne à lire est sublime quoique banal au niveau informatif. Mais il faut reconnaître le ton incisif et cristalin employé. En effet après la fameuse théorie des "priorités", ne voilà-t-il pas une autre théorie raciste et assassine, celle de la "minorité/majorité".
Bouteflika, La Palice et nos Kabyles
Par Mohamed Benchicou, Le Matin du 01/11/01
On a fini par le savoir : ce n'est point clabauder sur le compte du chef de l'Etat que de constater l'usage abusif qu'il fait des mots selon l'auditoire, les saisons, la conjoncture et l'humeur. On soutiendra à raison que c'est le privilège des souverains de se moquer de la parole donnée et qu'il s'est toujours trouvé une raison supérieure pour leur pardonner la frivolité de leurs propos. Il reste que lorsque Bouteflika affirme, l'air grave et péremptoire, à propos de la Kabylie, que « la minorité doit toujours se soumettre à la majorité », il commet plusieurs péchés à la fois dont, j'en suis convaincu, il ne mesure aucune des graves conséquences. L'injure : les insurgés kabyles sont invités à se compter et à constater leur infériorité numérique avant d'entreprendre quelque audace irréfléchie qui leur vaudrait de cuisants échecs. L'aveu de roublardise : le Président confesse que le référendum promis pour constitutionnaliser tamazight n'était qu'une malice de plus destinée à démontrer « légalement » que la « majorité » du peuple ne veut pas de cette langue « minoritaire ». L'ignorance du monde : Bouteflika en est resté à l'époque où l'on méprisait des « minorités » sans s'apercevoir que la planète a tourné plusieurs fois pendant son séjour aux Emirats, et que nulle part sur Terre, on n'oppose les « minorités » aux « majorités », qu'elles soient tamoules, corses, kirghises ou basques. Enfin, le délit absolu de lapalissade, le plus impardonnable, celui qui expose son auteur à lui-même : le souci de Bouteflika pour la primauté de la majorité sur la minorité doit être très récent, suffisamment récent en tout cas pour ne l'avoir pas empêché de dormir lors des élections présidentielles de 1999 qu'il a remportées grâce notamment au fait que cette primauté n'a pas fonctionné, sans parler du putsch de 1965 pour lequel, on s'en doute, Bouteflika n'a pas cru utile de solliciter l'avis de la majorité.
Et dès aujourd'hui nous sommes sommés de réfléchir à quelles impasses nous conduisent les fatuités présidentielles : la colère sera aujourd'hui du côté d'Ighil Imoula, sourde, encore plus tenace, à la portée incalculable, secouant une population humiliée dans sa chair Et nous serons encore des millions, majorités et minorités confondues, à subir deux années encore ces fatales fatuités qui nous bercent dans un monde incertain, qui nous disent que l'école va être réformée comme le fut si brillamment la justice, que les coupables désignés par Issad vont être jugés en public, qu'il ne subsiste plus que 400 à 500 terroristes dans nos maquis soudainement nettoyés, que nous approchons du règne du plein-emploi avec un plan de relance de l'économie que nous envie déjà Wall Street, bref que l'Algérie est devenue « fière et digne » et qu'un gala grandiose est prévu à Alger avec Enrico Macias en vedette pour fêter ce bonheur retrouvé.
M. B.
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